13 Mars 2011
Bonsoir à tous,
Ce vendredi 11 mars 2011, une sympathique journée était prévue avec deux amis venus de France.
Direction Shimokitazawa pour emmener mon pote Florent chez mon coiffeur.
13h00, on arrive à la station, on se balade pour ressentir toute l’ambiance de ce quartier. On va chez
le coiffeur (CAPA, je vous le recommande). Mon ami me prête son appareil photo pour le filmer et
prendre quelques clichés souvenirs de cette expérience capillaire nipponne.
14h46, c’est au moment de son 2ème shampooing que se déclenche le gros séisme. Je vis à Tôkyô
depuis novembre et j’ai eu l’occasion de ressentir pas mal de tremblements de terre, je n’ai donc pas
paniqué quand j’ai senti les murs trembler, je me disais ça va passer vite. Mais ça ne passait pas, ça
s’intensifiait… au bout de 20 secondes ça tremble très fort et les produits commencent à tomber.
Prise d’un réflexe professionnel, je prends l’appareil de mon ami et je filme le tremblement de terre.
Mais l’appareil n’a pas fait le point du coup c’est tout flou tout le temps T___T
On voit les coiffeurs dire gentiment aux clients de sortir dehors sans trop de panique même si tout
tombe partout… et c’est quand on sort dehors qu’on voit la masse de monde dans la rue. Ça, c’est
flippant. Il y a quelques personnes qui pleuraient, d’autres qui ont l’air évanouies. Je ne vous cache
pas que ça ressemble à un film… mon pote est ressort du salon avec sa nouvelle coiffure kakkoi car
heureusement le coiffeur lui avait coupé les cheveux avant que ça ne tremble !
Tout le monde est bien perturbé, aussi bien le staff que les clients, même si tout le monde a le
sourire. C’est en repartant qu’on sent le changement d’ambiance… Tout le monde est dans la rue,
plus personne dans les magasins, les fast food ne font plus à manger, les magasins commencent à
fermer partout.
On se dirige vers la gare de Shimokitazawa pour aller à Harajuku où on a rendez-vous avec une amie.
Et là on découvre que les trains de la ligne Odakyu ne circulent plus. Alors, innocents comme nous
l’étions, on se dirige vers la ligne Keiô en pensant que celle-ci fonctionne.
15h15, nouvelle secousse qui remue la rue, les poteaux électriques tanguent, les câbles au dessus de
nos têtes aussi. Les gens sont encore plus en panique. Cette fois ça ne dure pas longtemps. Mais on
est résignés, on ne pourra pas aller à Harajuku en train.
On commence donc à longer la ligne de train pour rejoindre la Inokashira dôri qui mène à Harajuku :
heureusement que je fais tous ces trajets à vélo ! On remarque que peu de temps après être sortis
du salon de coiffure, plusieurs nuages noirs flottent au dessus de nos têtes. On est persuadés de se
prendre une grosse averse, mais finalement, rien ne tombe. Sur la route je reçois un message de la
famille Yokota d’Hiroshima, ils me disent qu’ils ont vu aux infos qu’à Tôkyô il y avait eu un terrible
tremblement de terre, et voulaient savoir comment j’allais. Là, je réalise que c’est grave vu qu’on en
a parlé aux infos…
Durant notre longue traversée, on observe la population : jamais je n’ai vu autant de gens dans les
rues. Les bus sont blindés et tous les taxis qui passent sont pleins. On est obligés de continuer à pied.
J’ai envoyé plusieurs e-mails à mes amis pour savoir comment ça s’était passé de leur côté, mais le
réseau commence déjà à être encombré ; je reçois les messages avec beaucoup de retard.
Après presque une heure et demie de marche à pied, nous arrivons au parc Yoyogi. Là, on voit tous
les oiseaux et les corbeaux s’envoler. Rien de très positif… et toujours autant de gens qui ont l’air de
chercher leur chemin. De mon côté j’ai essayé de mailer à quelques amis pour savoir comment ils ont
vécu la secousse qui me semblait tout de même assez violente…
17h04, arrivés à Harajuku, on décide de faire du lèche vitrine histoire de passer le temps puisqu’en
arrivant on a découvert que la Yamanote ne marchait plus. Oui, on était vraiment bête de penser
qu’après un petit tour, ça refonctionnerait… surtout que la plupart des commerces sont fermés… les
petites ruelles après Takeshita sont bien vides et bien sombres, c’est triste… Ai-je besoin de rajouter
que mon amie n’a finalement pas pu venir car bloquée chez elle ? Fatalité, quand tu nous tiens !
Vers 18h, on entreprend le pèlerinage que tous les nippons se sont décidés à entreprendre. Prendre
la route vers Shinjuku, gare centrale où il y aura peut-être plus de possibilités. Sur la route il y a
Yoyogi, ça tombe bien, c’est là-bas qu’on avait prévu de dîner avant l’épisode catastrophe du début
d’après-midi.
En approchant du restaurant de Yakiniku où j’avais réservé, je croise les doigts pour le trouver
ouvert…. Plus que 20m… 10m… 5m… on tourne à gauche et … MIRACLE de la lumière et des
clients !!! On aura au moins notre resto du soir !! Là il faut réfléchir, je n’ai aucun moyen de
communiquer car on ne peut toujours pas téléphoner, les réseaux sont bloqués, je peux juste
envoyer des e-mails. Mon téléphone est un « prepaid », donc je n’ai pas a-s à internet pour me
renseigner sur la situation.
18h45, on part chercher un « Manga kissa » ou un « Net Cafe » où on pourra se connecter au monde
cybernétique appelé Facebook et Twitter On en trouve un juste à côté de la gare de Yoyogi, mais il
faut se créer une carte de membre… on a la flemme… et Flo décide de chercher un accès wiki gratuit.
Trop malin, il en trouve un. Après plus de 15 min de tentatives je réussit à m’y connecter, et là c’est
la dégringolade en enfer…
Je découvre sur Twitter tout ce qu’il s’est passé au Japon, beaucoup de gens sont inquiets pour
moi, ma famille a essayé de me joindre en vain, réseaux encombrés, la catastrophe de Sendai, les
morts, bref, je réalise l’étendue des dégâts de ces quelques minutes qui ont changé la vie de tant de
personnes…
Je m’empresse de répondre et ho miracle, je peux entrer en communication avec mon ami Mathieu
pour qui j’étais en stress car il ne répondait nulle part, mais Twitter fonctionne. On se donne rendez-
vous au resto. Je ne peut évidemment pas répondre à la cinquantaine de messages sur Twitter, mais
j’ai essayé de communiquer sur le fait que j’allais bien. C’était l’essentiel.
19h45, nous sommes partis récupérer Mathieu à la garde de Shinjuku, du côté sud. Et là, on dirait
l’apocalypse, un nombre incalculable de gens sont là devant la gare, à attendre que quelqu’un
leur dise que les lignes JR (compagnie nationale de chemin de fers) fonctionne à nouveau. Sur le
chemin, nous avons vu beaucoup de japonais se réfugier dans des halls de bâtiments, ils ne pourront
sûrement pas rentrer chez eux…
Cette nuit-là, il a fait particulièrement froid. On a mangé un yakiniku mais le cœur n’y était pas… On
avait un peu perdu l’appétit, alors que c’était à volonté T__T
22h00, on retourne vers Shinjuku et on découvre que la ligne Oedo circule à nouveau ! Bonne
nouvelle pour beaucoup de gens dont Flo et Tadjah qui devaient retourner de l’autre côté de Tôkyô.
De mon côté, je ne me sentais pas de rentrer seule chez moi, donc je suis allée chez mon ami
Mathieu qui vit juste à côté.
Une fois dans l’appartement, on a regardé encore plus d’infos sur les évènements passés et ça m’a
encore plus déprimé. Physiquement je vais bien, mais psychologiquement je me sens démolie.
Et le pire, c’est que demain, la vie reprend un cours « normal », je vais aller bosser, mais c’est pas
pour autant que tous les évènements passés vont s’effacer d’un coup. Non, les répliques ne vont pas
s’arrêter avant plusieurs semaines. Vous imaginez ?!! On va sentir des tremblements faibles toutes
les 30 minutes environs T__T ça me désespère !!
Au moment où j’écris ces lignes, je ne suis pas encore rentrée dans mon studio. J’ai très peur de ce
que je pourrai y découvrir. Je vais retourner y vivre seule et j’ai très peur… on a vu aux infos qu’il
risque d’y avoir un nouveau séisme encore plus fort, le fameux « Big one » tant attendu T__T
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Depuis il s'est passé beaucoup d'autres choses, j'en ferais d'autres articles si la situation me le permet !
Bisous à tous !
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